2 novembre 2008
chronique d'une victoire annoncée
A trois jours de l'élection, les sondages répondent invariablement de la même manière : Obama sera élu président. Il existe certes des variations selon les enquêtes, mais en considérant les hypothèses les plus pessimistes pour Obama, celui-ci sort quand même vainqueur du scrutin. Une mobilisation des électeurs républicains à la dernière minute ? Cela ne suffit pas pour McCain. Une désaffection d'électeurs blancs qui ne se font pas à l'idée de voter pour un homme noir ? Cela ne suffit pas. Les électeurs indécis qui décident en bloc de voter républicain ? Non plus. Des sondages qui se tromperaient en bloc ? Il y en a vingt par jour, avec des échantillons différents, des redressements différents. AUCUN n'a donné McCain vainqueur, c'est aussi simple que cela. Il y a quatre ans et huit ans, les sondages étaient très serrés, bien en-deça de la marge d'erreur. Il faut remonter à l'élection de Clinton en 1996 pour avoir des sondages aussi nets. Dans l'ensemble, les sondages de présidentielles américaines ne se trompent pas (sauf en 1948, comme j'ai déjà eu l'occasion de l'expliquer).
Bref, en dépit des prudences journalistiques (qui tiennent souvent à un suspens qu'il s'agit de maintenir pour l'audience), il est raisonnable de dire que Obama sera presque certainement élu président le 4 novembre au soir. La possibilité qu'il le soit avec une marge énorme en grands électeurs est infiniment plus grande que la possibilité qu'il soit battu. Le suspense se résume donc à ceci : quelle sera la marge d'avance de Obama ?
Le problème principal pour Obama et ses troupes consiste à faire voter les électeurs. Leur potentiel électoral est très supérieur à celui de McCain. Mais encore faut-il que les électeurs aillent voter. Or, du côté démocrate, la mobilisation est historiquement moins bonne, en raison des caractéristiques sociologiques de cet électorat. Les Démocrates sont en moyenne plus jeunes que les Républicains. Or plus on est âgé, plus on vote (c'est vrai aussi en France). D'où l'effort mené pour inscrire les jeunes sur les listes électorales. En outre, l'électorat démocrate est en bonne partie composé de personnes à revenus modestes, surtout dans les minorités. Là aussi, la question de la participation électorale se pose : plus les revenus sont faibles, moins on vote, en raison d'une plus grande indifférence aux débats politiques, de difficultés de vie qui font passer le devoir électoral au second plan, mais aussi de l'impossibilité de voter. Les quartiers pauvres des villes ont moins de bureaux de vote que les autres quartiers, il faut attendre longtemps, ce qui n'est pas toujours facile quand on travaille, ou que l'on garde des enfants. Dans le Sud des Etats-Unis, encore marqué par les vieilles pratiques de ségrégation, il arrive que des électeurs noirs soient refoulés des bureaux de vote, au motif qu'ils n'ont pas les papiers nécessaires (c'est ce qui s'est passé dans le nord de la Floride il y a quatre ans). Dernier élément : la démobilisation de l'électorat, à l'annonce d'une victoire attendue… Le matraquage publicitaire actuellement opéré par Obama n'a pas pour fonction de décider les électeurs : dans leur immense majorité, c'est déjà fait. Il vise surtout à rappeler aux Démocrates qu'il faut voter, si possible en avance.
Par contraste, l'objectif des Républicains est double : que l'électorat déjà convaincu par McCain aille bien voter (c'est faisable) ; et que des masses d'électeurs indécis ou favorables à Obama changent d'avis (c'est trop tard). L'horloge des douze coups de minuit s'apprête à sonner. Les jeux sont faits.
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