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Elections américaines vues par Pap Ndiaye
Elections américaines vues par Pap Ndiaye
25 octobre 2008

Le secret d'Obama

Lorsque les commentateurs parlent d'Obama, ils soulignent généralement ses qualités politiques en disant qu'il est un excellent orateur. Il est vrai que la communication avec le public est essentielle pour un homme politique d'envergure, et Obama ne faillit pas à la règle. Cependant, il n'est peut-être pas le meilleur orateur de la vie politique américaine contemporaine. Sur ce terrain, il a encore un maître, en la personne de Bill Clinton. Celui-ci n'est pas né grand tribun. Dans ses jeunes années, Clinton avait la réputation d'être un discoureur interminable, capable d'endormir son audience. Puis il s'est amélioré, a appris à être moins bavard, plus incisif dans ses formules. Et il est vraiment devenu très très bon. Obama est doué, c'est incontestable, et il a une qualité essentielle en la matière : il aime parler devant une audience. Mais il n'est pas encore parfait dans la gestion de ses discours, dans ses tempos. Il galvanise par sa personne, par ce qu'il dit, mais ce n'est pas encore un tribun d'exception. Obama le deviendra sûrement, en tout cas, il a toutes les qualités pour cela. axelrod Non, ce qui fait d'Obama un politique hors norme, ce sont deux choses : d'abord sa personnalité : un homme noir, dont l'histoire personnelle, le style, ne renvoient pas au monde afro-américain stricto-sensu. Je reviendrai un autre jour sur cette question. L'autre aspect essentiel, souvent minoré, c'est que Obama est le meilleur organisateur de campagne que les Etats-Unis aient connu. C'est un manager qui sait s'entourer de femmes et d'hommes compétents, ce qu'il a fait depuis longtemps. David Axelrod, par exemple, est son stratège depuis qu'il s'est lancé en politique, et les deux hommes se connaissent depuis quinze ans. Il s'intéresse également de près aux questions financières, à l'organisation des équipes de campagne dans chaque Etat. Rien n'est laissé au hasard, tout est planifié à l'avance, d'une manière telle que les concurrents d'Obama, Hillary Clinton pendant les primaires démocrates et McCain aujourd'hui, sont apparus comme de gentils amateurs. L'utilisation d'internet par exemple, a été mise à profit de main de maître pour récolter des fonds et organiser les équipes régionales et locales. L'avantage financier et organisationnel du Démocrate sur le Républicain est tout simplement gigantesque. Cela lui a permit de devenir dangereux dans des Etats jadis considérés comme sûrs par le Parti républicain. Ainsi de la Virginie, de la Caroline ou de la Floride. En Virginie, Kerry n'avait guère que quatre ou cinq bureaux locaux, histoire de faire plaisir aux militants. Il était hors de question pour lui de dépenser des ressources dans cet Etat. Obama a plus de quarante bureaux locaux, et il a monté une organisation qui fait l'admiration des Républicains virginiens. Même chose en Floride : pendant que McCain avait les yeux tournés ailleurs, les Démocrates ont inscrit 660 000 personnes sur les listes électorales, et se sont organisés, grâce à une multitude de volontaires, pour que ces personnes votent d'ores et déjà, ou aillent voter le 4 novembre. Le pire, pour les Républicains, est que les Démocrates ont appris d'eux. Car ce sont les Républicains qui dominent dans l'exercice depuis les années 1980. Un historien a même montré que dès 1964, Barry Goldwater avait déjà monté une organisation "grass roots" efficace, même si cela n'avait pas empêché une défaite très nette. Puis les Républicains ont avancé, en structurant leur réseau de petits militants et donneurs, au moment de l'élection de Reagan, en 1980. Rove et les stratèges républicains ont perfectionné le système, qui leur a donné un avantage certain en 2004, en leur permettant de remporter des "swing states" comme l'Ohio. Les Démocrates ont réagi avec retard, même si Clinton, en 1992 et 1996, s'était à peu près hissé au niveau de ses adversaires républicains. Mais Gore et Kerry, peu doués pour l'organisation, avaient été nettement distancés. Obama et Axelrod ont étudié le système républicain avec soin avant de lancer leur campagne, avec le succès que l'on sait. A ce stade, il est possible de parler de la machine politique la plus sophistiquée, la plus huilée, la mieux financée que la politique américaine ait jamais connue. Photo : David Axelrod, chef stratège de la campagne Obama.
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